Le vendredi 5 février 2016, Ilker Birkan a soutenu sa thèse de doctorat en sociologie intitulée: "Pourquoi l'art contemporain en Turquie? Enquête sociologique à Istanbul, des Tanzimat à Gezi"


Devant un jury composé de:

Ali AKAY, Professeur de sociologie, Université des beaux-arts Mimar Sinan (co-directeur)

Selçuk DEMIREL, Membre d'honneur de l'Institut des Etudes Avancées de Nantes

Ali EL KENZ, Professeur de sociologie, Université de Nantes (co-directeur)

Servet ERTUL, Maitre de conférences (HDR) en sociologie, Université du Maine 

Gilles FERREOL, Professeur de sociologie, Université de Franche-Comté (rapporteur)

Nora SENI, Professeure d'histoire, Université Paris 8 (rapporteur)

Yves TERTRAIS, Maître de conférences en sociologie, Université de Nantes


Résumé

La ville d'Istanbul témoigne d'un développement très rapide de l'art contemporain. Des centres artistiques exposent des œuvres et aident à la création artistique, des musées privés sont ouverts par des collectionneurs et des grandes entreprises, des galeries toujours plus nombreuses diffusent des œuvres. Cette énergie, accompagnée d'une visibilité croissante des artistes turcs dans le monde, représente une situation singulière du Proche-Orient et dans le monde musulman. Notre thèse cherche à comprendre quels sont les institutions, les modes d'organisation, les modes de sensibilité qui se sont mis en place dans la société turque, pour y promouvoir l'art contemporain et quels processus sous-tendent l'éclosion de ces pratiques artistiques actuelles.

Loin d'être le produit de la seule « mondialisation économique » qui uniformiserait les façons de penser dans le monde entier, le développement de l'art actuel en Turquie s'inscrit dans un processus historique de transformation de la société trouvant ses racines à la fin de l'Empire ottoman. L'appropriation de techniques et de savoirs occidentaux, considérés comme universels, devient un enjeu majeur de renouveau pour l'Empire ottoman en déclin puis pour la République de Turquie qui s'est bâtie sur ses ruines. Au 20ème siècle, les arts d'origine occidentale se sont vu donner toute leur place dans la société turque et y ont suivi les mêmes évolutions qu'en Europe. De ce fait, l'art contemporain a pu s'affirmer à la fin du 20ème siècle comme un véritable phénomène artistique dans la ville d'Istanbul.

Par contre, l'Etat premier instituteur de la culture occidentale en Turquie avec Mustafa Kemal s'intéresse moins à cet art aujourd'hui que les élites culturelles et économiques du pays qui l'achètent, le financent et créent ses institutions. Deux usages sociaux de l'art contemporain apparaissent alors dans l'espace culturel turc, il s'inscrit dans un espace réflexif institutionnalisé qui s'élève comme rempart contre le conservatisme culturel et il constitue dans l'espace mondial un symbole d'affirmation civilisationnelle pour les élites d'une nation héritière d'un projet impérial.