Titre provisoire de la thèse

Devenir, être, et se (re)convertir : les carrières des aides-soignants en EHPAD  

Direction et co-direction

Pascale Moulévrier et Sophie Orange

Résumé : En octobre 2019, les syndicats des salariés de maisons de retraite appellent à la grève au nom de « l’épuisement physique et moral des salariés » et du manque d’effectifs. Si ces revendications touchent une certaine catégorie de métiers de la santé, elles correspondent également à un personnel très féminisé (proportion des femmes supérieure à 90 %) et peu expérimenté (près de la moitié a moins de cinq ans d’ancienneté). Cette faible ancienneté dans le poste tient au développement important de nouveaux EHPAD (établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes) au cours des dix dernières années, mais aussi au fort turn-over qui affecte ces emplois. En effet, le travail en EHPAD est marqué par la pénibilité à la fois physique et psychique, les soignants devant porter des charges lourdes, effectuer des tâches répétitives et dévalorisées dans des temps limités, tout en prenant en charge l’intimité et la souffrance des patients. Les difficultés de ces missions sont accentuées par des conditions d’emplois souvent précaires : temps partiels, horaires décalés, porosité des métiers, différence entre travail prescrit et travail réel, etc. En parallèle, une transformation importante de la gestion s’opère, avec notamment une montée en puissance des formations managériales et financières des directeurs d’établissement. Si les pouvoirs publics se sont saisis de cette problématique et plaident notamment pour un accroissement de l’attractivité des métiers du grand âge par la prévention des risques professionnels et le développement de perspectives de carrière, il paraît nécessaire de proposer une analyse fine des  mutations du métier d’aide-soignant en EHPAD, en le réinscrivant dans les configurations territoriales dans lesquelles il est exercé mais aussi dans les trajectoires d’insertion professionnelle de jeunes femmes – majoritairement – dont le niveau de qualification a fortement augmenté ces dernières années. Ce projet viendra poursuivre des travaux passés et en cours menés au CENS portant sur les classes populaires, par le prisme des professions du care, et selon une forte dimension « genre ». S’intéressant à ce que les routines de travail font au corps des aides-soignants, à leur rapport à l’activité et à leurs « clients », il alimente les questions traitées au CENS sur ce que le social fait au corps, dans un contexte de pénurie des moyens.